c) D’où vient la peur du fédéralisme ?
Les détracteurs du système fédéral, en tout cas ceux qui s’y sont opposés au cours de l’étrange processus qui a conduit à la constitution en vigueur en RDC, doutent de sa capacité intégratrice. Ils soutiennent que dans une société multiethnique où les différences régionales sont aussi marquées qu’en RDC, il favoriserait trop les intérêts régionaux qui finiraient en des divisions insurmontables. C’est là un cas théorique seulement, on dirait même hypothétique. Une crainte pareille a conduit l’Afrique du Sud à adopter la fameuse « devolution » plutôt que la fédération. La réalité pratique démontre le contraire. Dans une analyse de la solution aux conflits au sein du système fédéral, Gagnon[1] démontre qu’il ne faut pas juger si le système peut éliminer les conflits. Il faut en revanche tester son habileté à résoudre les conflits qui surgissent. Les conflits sont parfois inévitables dans les relations sociales. Les systèmes fédéraux qui semblent avoir résisté le test de l’histoire ne l’ont pas fait pour avoir éliminé toute possibilité de conflit, mais pour avoir su les résoudre en utilisant les mécanismes de consultation, coopération et collaborations dont ils se sont dotés. Les instances de dialogue sont plus près des problèmes à résoudre. C’est de cette manière que le système fédéral arrive à favoriser une culture politique de vraie tolérance parce que reconnaissant les caractéristiques distinctives des groupes humains, des régions, etc.
L’échec de certaines fédérations dans le tiers-monde aussi a fait croire qu’il s’agit d’un système défectif. Mais cet échec est à imputer à l’immaturité politique du leadership dans le tiers-monde longtemps incapable d’assumer et d’assimiler la discipline qu’exige la combinaison « shared rule » (gouvernance partagée au niveau fédéral) et « self-rule » (auto gouvernance au niveau fédéré) corrélative aux deux niveaux de gouvernance du système fédéral. D’autre part, l’efficacité du système fédéral dépend énormément de la capacité de respect des normes constitutionnelles, des structures établies par ces normes, l’esprit inclusif et la vraie tolérance. Or, dans le cas de la RDC la culture politique, jusqu’à présent, a été abordée à partir des paramètres plutôt dictatoriaux, ignorant et même rendant impossible ces conditions essentielles à une gouvernance responsable. Il n’est pas étonnant qu’aujourd’hui encore il y ait tellement de résistance à adopter le fédéralisme. Mais cette résistance ne trouve plus de fondement que dans la peur de perdre les « valves » par lesquelles le pouvoir central a rançonné son propre peuple, en réduisant ses richesses humaines et ressources naturelles à de simples instruments de division aussi bien à l’intérieur de ses frontières que dans ses relations avec ses voisins.
Conclusion
Dans un pays où les excès du pouvoir central ont coûté des millions de vies humaines et un demi-siècle de sous-développement plongeant tout un peuple dans un marasme économique chronique, il est absurde de ne pas considérer avec attention l’adoption une structure de l’Etat qui soit une alternative convaincante. L’exposé ci-dessus a voulu démontrer que le système fédéral est apte à éviter qu’une majorité arithmétique manipulée électoralement puisse brûler de vitesse les minorités ; qu’il est apte à alléger, si non éliminer ou résoudre efficacement les divisions et menace de sécession des minorités ; qu’il est apte à fomenter efficacement l’intégration culturelle et l’autonomie sans porter atteinte à l’intérêt général et finalement qu’il est pratiquement le seul système qui, jusqu’à présent est capable de combiner l’unité et la diversité en résorbant les dissensions internes, et en adoptant une ouverture fructueuse vers l’extérieur. Il n’est bien sûr pas une panacée pour les nombreux maux accablant la RDC. La difficulté de son adoption se résume dans le fait qu’il implique une option prudentielle et pragmatique de la part des acteurs politiques. C’est au fond cela la politique. L’art de gouverner avec prudence des communautés humaines dans le respect de leurs cultures et vers des objectifs qui visent leur développement intégral.
Si les acteurs politiques sont capables de prudence et pragmatisme, alors le système fédéral serait, sans doute pour la RDC, un instrument nécessaire pour le rétablissement de la paix et du développement tant désirés. C’est un modèle d’organisation sociale qui tourne la diversité en harmonie. La fédération n’est pas aliénatrice des différences culturelles, elle est plutôt le point de convergence, le carrefour, la délicate synthèse entre le respect des cultures et le progrès. En tant que telle, elle peut permettre une approximation à la justice sociale et pas seulement au bien être. Elle pourrait même contribuer à la récupération de la responsabilité morale dans les affaires publiques dont le pays a grandement besoin.
[1] Gagnon, A-G. (1993), The political uses of federalism, as quoted by Watts R.L.
Les détracteurs du système fédéral, en tout cas ceux qui s’y sont opposés au cours de l’étrange processus qui a conduit à la constitution en vigueur en RDC, doutent de sa capacité intégratrice. Ils soutiennent que dans une société multiethnique où les différences régionales sont aussi marquées qu’en RDC, il favoriserait trop les intérêts régionaux qui finiraient en des divisions insurmontables. C’est là un cas théorique seulement, on dirait même hypothétique. Une crainte pareille a conduit l’Afrique du Sud à adopter la fameuse « devolution » plutôt que la fédération. La réalité pratique démontre le contraire. Dans une analyse de la solution aux conflits au sein du système fédéral, Gagnon[1] démontre qu’il ne faut pas juger si le système peut éliminer les conflits. Il faut en revanche tester son habileté à résoudre les conflits qui surgissent. Les conflits sont parfois inévitables dans les relations sociales. Les systèmes fédéraux qui semblent avoir résisté le test de l’histoire ne l’ont pas fait pour avoir éliminé toute possibilité de conflit, mais pour avoir su les résoudre en utilisant les mécanismes de consultation, coopération et collaborations dont ils se sont dotés. Les instances de dialogue sont plus près des problèmes à résoudre. C’est de cette manière que le système fédéral arrive à favoriser une culture politique de vraie tolérance parce que reconnaissant les caractéristiques distinctives des groupes humains, des régions, etc.
L’échec de certaines fédérations dans le tiers-monde aussi a fait croire qu’il s’agit d’un système défectif. Mais cet échec est à imputer à l’immaturité politique du leadership dans le tiers-monde longtemps incapable d’assumer et d’assimiler la discipline qu’exige la combinaison « shared rule » (gouvernance partagée au niveau fédéral) et « self-rule » (auto gouvernance au niveau fédéré) corrélative aux deux niveaux de gouvernance du système fédéral. D’autre part, l’efficacité du système fédéral dépend énormément de la capacité de respect des normes constitutionnelles, des structures établies par ces normes, l’esprit inclusif et la vraie tolérance. Or, dans le cas de la RDC la culture politique, jusqu’à présent, a été abordée à partir des paramètres plutôt dictatoriaux, ignorant et même rendant impossible ces conditions essentielles à une gouvernance responsable. Il n’est pas étonnant qu’aujourd’hui encore il y ait tellement de résistance à adopter le fédéralisme. Mais cette résistance ne trouve plus de fondement que dans la peur de perdre les « valves » par lesquelles le pouvoir central a rançonné son propre peuple, en réduisant ses richesses humaines et ressources naturelles à de simples instruments de division aussi bien à l’intérieur de ses frontières que dans ses relations avec ses voisins.
Conclusion
Dans un pays où les excès du pouvoir central ont coûté des millions de vies humaines et un demi-siècle de sous-développement plongeant tout un peuple dans un marasme économique chronique, il est absurde de ne pas considérer avec attention l’adoption une structure de l’Etat qui soit une alternative convaincante. L’exposé ci-dessus a voulu démontrer que le système fédéral est apte à éviter qu’une majorité arithmétique manipulée électoralement puisse brûler de vitesse les minorités ; qu’il est apte à alléger, si non éliminer ou résoudre efficacement les divisions et menace de sécession des minorités ; qu’il est apte à fomenter efficacement l’intégration culturelle et l’autonomie sans porter atteinte à l’intérêt général et finalement qu’il est pratiquement le seul système qui, jusqu’à présent est capable de combiner l’unité et la diversité en résorbant les dissensions internes, et en adoptant une ouverture fructueuse vers l’extérieur. Il n’est bien sûr pas une panacée pour les nombreux maux accablant la RDC. La difficulté de son adoption se résume dans le fait qu’il implique une option prudentielle et pragmatique de la part des acteurs politiques. C’est au fond cela la politique. L’art de gouverner avec prudence des communautés humaines dans le respect de leurs cultures et vers des objectifs qui visent leur développement intégral.
Si les acteurs politiques sont capables de prudence et pragmatisme, alors le système fédéral serait, sans doute pour la RDC, un instrument nécessaire pour le rétablissement de la paix et du développement tant désirés. C’est un modèle d’organisation sociale qui tourne la diversité en harmonie. La fédération n’est pas aliénatrice des différences culturelles, elle est plutôt le point de convergence, le carrefour, la délicate synthèse entre le respect des cultures et le progrès. En tant que telle, elle peut permettre une approximation à la justice sociale et pas seulement au bien être. Elle pourrait même contribuer à la récupération de la responsabilité morale dans les affaires publiques dont le pays a grandement besoin.
[1] Gagnon, A-G. (1993), The political uses of federalism, as quoted by Watts R.L.
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